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     Ce matin encore, c'est sur son canapé qu'Honoré ouvre péniblement un œil. Un bref aperçu des lieux lui permet de se remémorer le fil de la soirée : l'ordinateur allumé, personne n'est venu lui parler, un morceau de pizza gisant dans sa boite sur la table basse, sa tasse à moitié vide et, un peu partout, étalés dans un ordre que lui seul peut saisir, des feuillets noircis, raturés et remplis de ces histoires qu'il ne finit jamais. Un bref regard sur l'horloge. Il est 7h23. Dans 7 minutes, Blanche passe devant chez lui pour promener Raspout. Le timing est serré. Il va falloir être prêt à temps.

 

      Honoré se lève d'un bond, si tant est que l'on puisse considérer le lent redressement d'un pudding dans une assiette de marmelade comme étant un bond. En trainant des pieds et en étirant son dos courbaturé par l'inconfortable nuit, il se dirige tel un sprinter neurasthénique vers la cafetière pour faire couler son indispensable breuvage. Une cuillère, deux cuillères, deux cuillères et demi. Le compte est bon.


      Plus que 5 minutes. Le tour dans la salle de bain est bref. Honoré se regarde dans le petit et unique miroir de l'appartement. La mine est blanche, les yeux sont gonflés et cernés, les cheveux en bataille.

_ Je vais avoir besoin d'un petit coup de jeune, dit-il à haute voix.

      La coquetterie selon Honoré s'articule en trois étapes. Tout d'abord, un double passage de la main droite dans les cheveux, pour ramener la mèche grasse en arrière. Ensuite, les jours d'apparat, un grand coup d'eau fraiche sur le visage qui laisse des marques d'humidité sur le haut du col de sa chemise. Et enfin, pour les grandes occasions, comme un passage de Blanche, du parfum pour se sentir frais.

_ Me voilà prêt. Beau comme un Cupidon, fier comme un Napoléon, poursuivit-il en bombant le torse et en rentrant le ventre. Aucune femme ne peut résister à mon charme !

 

      Il tenta d'esquisser un sourire d'acteur américain mais ses muscles étaient encore dans le canapé, en train de ronfler.

_ Plus que trois minutes... Café !

Le moka est coulé. D'une main il l'engloutit plus avidement que la baleine faisant son casse-croute de Jonas, tandis que de l'autre main il tente de lacer ses chaussures.

_ Plus qu'une minute, souffla-t-il en reposant sa tasse et en cherchant ses clefs. Il faut que je me presse.


 

     Un dernier coup d'œil dans le miroir. Tout est parfait. Honoré claque la porte de la grotte, traverse d'un pas rapide le hall d'entrée de l'immeuble et arrive dehors. Ses yeux pas encore habitués à la lumière vive d'une matinée de juin cherchent péniblement des repères. A gauche, rien. A droite une silhouette.

_ Est-ce elle ? S'interroge-t-il en plissant tout le haut de son corps.

L'ombre s'approche doucement. Il connait cette démarche, aperçoit Raspout. Oui c'est bien elle.

 

 


 

Tag(s) : #Le sofa d'Honoré
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